1. Le terrain

Cet articles est le 1 sur 3 de l'enquête Enquête sur le spectacle Contraindre de Myriam Gourfink

On ne voit pas Contraindre, on l′éprouve. La pièce de la chorégraphe Myriam Gourfink, recréée à Nancy, le 20 mars 2007, par Cindy van Acker et Myriam Gourfink (Kasper Toeplitz et Laurent Dailleau pour la musique), déboulonne les cadres classiques du spectacle. L′espace n′est plus dual, organisé autour d′une ligne de partage entre ceux dont on attend qu′ils voient et ceux qui s′exposent à être vus. Si le terme n′en perdait pas son sens, on dirait que tout le monde est sur scène dans le spectacle de Myriam Gourfink : public, danseuses, musiciens, jusqu′à l′ingénieur responsable du dispositif de captation des mouvements et de transformation de la partition chorégraphique en temps réel, jusqu′à l′équipe de tournage même. Si tous se trouvent également exposés, l′espace n′est pas unitaire pour autant.

C′est là un autre verrou qui saute : il n′est pas de place qui assure une vue d′ensemble dans cet espace, pas de point de vue surplombant. L′espace est fragmenté et la visibilité toujours partielle. Le public, de ce fait, doit choisir de porter son attention sur l′une ou bien sur l′autre danseuse. A chaque place est en fait associé un spectacle. A ce niveau encore, il n′est pas évident que l′organe de la vue soit premier. Il est certes un « voyage » pour chacune des danseuses, mais il est largement intérieur, « voyage de la concentration dans le corps », avant d′être le voyage du corps dans un espace environnant. On doit apprendre à lire les indices d′un tel voyage afin d′y prendre part : dans l′enchaînement de micro-mouvements, dans l′ampleur d′une respiration, dans l′expression du visage, etc. Assis à moins de deux mètres d′une danseuse, le spectateur fait une expérience qui est bien davantage que visuelle, une expérience synesthésique.

D′autant, et c′est là un autre trait important du spectacle, qu′il est plongé et comme enserré dans un espace musical. Kasper Toeplitz, à qui l′on doit la musique, moyennant une dizaine d′enceintes réparties dans la salle, entre lesquelles circule l′onde sonore, crée ou mieux matérialise un espace : celui dans lequel évolue les danseuses, celui dans lequel sont pris les spectateurs, etc. Plus que leurs dimensions, c′est l′épaisseur de tels espaces qui importe, que la chorégraphe et le compositeur cherchent à rendre apparent. Les corps, tantôt légers, tantôt lourdement ancrés dans le sol, systématiquement inclinés (en appui sur des bords, des côtés, des extrémités) ou bien contraints à une stricte verticalité donnent ainsi à voir (à sentir) un espace plein, enveloppant, étreignant dans lequel les corps étreints semblent entièrement modelables. Plus que de corps en apesanteur, l′impression est celle de corps pris dans un matériau dense, en osmose avec ce matériau, tels peut-être des foetus dans une bulle amniotique. Notons que ces bulles ne sont pas hermétiques, qu′entre elles existent des canaux de communication. On compte notamment des capteurs émetteurs fixés sur le corps des danseuses (à la cheville, au genou, au niveau du ventre ou du thorax, au coude, sur un doigt, etc.), qui autorisent un double flux d′information : un flux sortant, fait de signaux électriques qui viennent renseigner le « chorégraphe virtuel » (le programme informatique générant la partition) ; un flux entrant, fait de signes chorégraphiques qui s′affichent à intervalles de temps réguliers sur les écrans qui entourent les danseuses (écrans posés au sol, sur lesquels elles lisent leur partition). L′expérience au final est bien plus riche que celle qu′une esthétique minimaliste semblait pouvoir offrir : expérience inédite, car rendue explicite, du corps, de sa mobilité et de son information dans l′espace.

Séquence de répétition

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Les deux danseuses répètent la pièce Contraindre. Elles évoluent chacune dans un espace propre, de deux mètres sur deux environ. Cet espace est délimité par quatre écrans LCD posés au sol.

Sur ces écrans s’affichent les pages successives de la partition chorégraphique à suivre. Cette partition, propre à chaque danseuse, varie en fonction des mouvements que la danseuse réalise (les mouvements réalisés à l’instant t-1 déterminent pour partie ceux demandés à l’instant t).

Séquence de préparation physique

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Pour clôturer une séquence de préparation physique, les deux danseuses concentrent, puis relâchent toute leur énergie.

Chaque séance de travail autour de Contraindre s’ouvre sur une telle préparation physique. D’inspiration yoggique, cette préparation dure entre deux et quatre heures.

Séquence de lecture de la partition après filage

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Suite à un filage sans interruption de la pièce, les deux danseuses reviennent sur certains signes de la partition chorégraphique qu’elles viennent de réaliser.

Le signe en question dans l’extrait, dont elles cherchent à expliciter tout à fait la signification en en testant les interprétations possibles, est un signe d’appui (double appui d’une jambe et d’un bras).

Suite à un filage sans interruption de la pièce, les deux danseuses reviennent sur certains signes de la partition chorégraphique qu’elles viennent de réaliser.
Le signe en question dans l’extrait, dont elles cherchent à expliciter tout à fait la signification en en testant les interprétations possibles, est un signe d’appui (double appui d’une jambe et d’un bras).

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